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Actu.fr Scènes de crime, syndrome de Diogène : Nettoyeur de l'extrême

Il est "nettoyeur de l'extrême" : Loïc Quiers est spécialisé dans le nettoyage à risque : après des décès, dans des logements insalubres, sur des scènes de crime… Nous l'avons suivi pendant une intervention.


Nettoyage post mortem, Nettoyeur de l'extrem Loïc Quiers

Une odeur mentholée flotte dans le couloir de l’immeuble, couvrant le léger relent qui émane du dernier appartement. Loïc, 29 ans, zippe la fermeture de sa combinaison de protection blanche et enfile son masque respiratoire intégral. Vu comme ça, le Bordelais semble tout droit sorti de la série Breaking Bad


Depuis presque dix ans, il est « nettoyeur de l’extrême ». C’est lui qu’on appelle pour nettoyer les scènes d’homicide, de suicide, les logements de personnes retrouvées mortes tardivement ou atteintes du syndrome de Diogène. Il est le dernier maillon de la chaîne, comme il dit. 



Désinfection et mise en sacs

Aujourd’hui, Loïc est à Bordeaux pour s’occuper de l’appartement d’un homme décédé « qui avait Diogène » – il accumulait massivement des objets et négligeait l’hygiène de son logement. Les pompes funèbres sont déjà passées enlever le corps comme à chaque fois, « et on a de la chance, il ne reste pas de fluides corporels », souligne le jeune homme.


Il pousse la porte de l’appartement, dont l’entrée est restée étrangement peu encombrée. Il a déjà passé « la machine pour désinfecter », qui atténue l’odeur persistante qui flotte dans l’appartement. « On commence par tout mettre en sacs », explique le nettoyeur en balançant des détritus dans un sac-poubelle. Il faut dire qu’il y a de quoi faire.


Recouvert de déchets

Le sol du salon est totalement recouvert d’emballages, de feuilles, de fringues ou de bouteilles vides. La cuisine n’est plus qu’un vaste tas de déchets, mélange de nourriture avariée, de boites de conserve et de vaisselle sale. Le lit semble être le seul mobilier épargné par l’accumulation, îlot presque vide entouré de cartons et de vêtements. 


Sur le chemin du salon vers les toilettes, des traces d’excréments laissent deviner l’état des WC, recouverts de déjections. Dans la salle de bains, la douche est couverte d’un dépôt marronâtre et le lavabo, d’une épaisse couche de poils de barbe.


Les nettoyeurs passeront environ deux jours à débarrasser tout le logement, avant une journée ou deux de ménage puis une nouvelle désinfection « pour se débarrasser des bestioles et des bactéries ». « Là, c’est un niveau léger de Diogène », assure Loïc. Il faut dire qu’il en a vu d’autres.


Des scènes marquantes 

Il a ouvert son entreprise en 2015, suite à une discussion avec un ami qui travaillait dans les pompes funèbres. « Il m’expliquait que souvent les familles doivent nettoyer elles-mêmes après le décès de leur proche, y compris les fluides corporels si le corps s’est décomposé », relate Loïc.


En France, seules une dizaine de sociétés sont spécialisées dans ce service. Il s’est dit qu’il y avait quelque chose à faire. « Je le fais dans le but d’aider les familles à mon niveau, soutient-il, pour eux c’est compliqué physiquement, mais aussi moralement de faire ça. » Alors, il prend le relais et tant pis si son métier est pénible.


On peut retrouver des fluides corporels, du sang, de la bile, des matières fécales, des cheveux, des bouts de peau ou des restes de corps... Certaines scènes vous marquent.

Loïc Quiers Nettoyeur de l'extrême


Comme celle d’un féminicide, où la cage d’escalier restée intacte pour les besoins de l’enquête est encore totalement couverte de sang, un an après les faits.


« Bien plus qu’un coup de serpillère »

« Au moins on ne s’ennuie jamais, sourit doucement Loïc, non sans sarcasme. Et puis ce qu’on fait, c'est très technique, c’est bien plus qu’un simple coup de serpillère. »


Par exemple, quand une personne décède sur le sol et qu’elle s’y décompose, ils doivent parfois enlever le parquet flottant ou la moquette, décaisser le sol, enlever le béton souillé… « S’il y a des fluides corporels même dans le béton, on aura une prolifération de bactéries, l’odeur persistera et c’est dangereux pour la santé », explique le chef d’entreprise.


Il arrive aussi, quand la personne est décédée près d’un mur en placo, de devoir « découper la cloison pour enlever la laine de verre ». En bref, « on demande à ce que les employés aient un minimum de connaissances dans le bâtiment, car on peut être amené à faire de vrais travaux », souligne Loïc. Sur environ dix chantiers, il estime qu’un quart peut nécessiter de telles interventions.


Le business de la mort

Le coût des services de la société NDS nettoyage (pour nettoyage après décès) varie au cas par cas, allant de quelques centaines à plusieurs milliers d’euros. Mais Loïc avertit : il vaut mieux mettre un prix correct que faire appel à des sociétés douteuses, qui risquent de mal faire leur travail.


« Depuis le Covid beaucoup de sociétés de nettoyage classiques s’y sont mises, sans produit ni machine professionnelle, et beaucoup de gens tombent dans le panneau, soupire-t-il. Ces entreprises font du business sur le dos des familles endeuillées. »


Il conseille donc de bien choisir l’entreprise et de bien lire les devis. De son côté, il est « loin de faire ça pour l’argent ». « Je le fais pour aider les familles, les accompagner au mieux, être une épaule sur cette partie-là », termine-t-il avant de remettre ses gants pour vider le logement, sac après sac.


Scènes de crime, syndrome de Diogène : il est "nettoyeur de l'extrême"


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